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Où il est question d’ouverture à l’autre

11 novembre 2008

Les rencontres d’Averroès, un moment précieux où

Les rencontres d’Averroès, un moment précieux où il est possible d’aller plus loin que les évidences. (Photo ROBERT TERZIAN)
Les rencontres d’Averroès, un moment précieux où il est possible
d’aller plus loin que les évidences. (Photo ROBERT TERZIAN)

Après la première table ronde des Rencontres d’Averroès qui invitait le nombreux public présent à remonter dans l’histoire pour  mesurer qu’entre Islam(s) et Occident(s), il n’y avait pas eu de rupture des échanges entre les rives de la Méditerranée, la première table ronde du samedi était consacrée à une actualité plus brûlante en abordant la question :   « Entre islam(s) et laïcité(s), fractures durables ou convergences possibles ». Débat animé par la journaliste Dominique Rousset, avec Cengiz Aktar, Abdenadour Bidar, Mustapha Cherif et Franck Frégosi. Et, là encore, n’en déplaise à ceux qui sur les deux rives, plaident en faveur d’une rupture définitive, des ponts existent, parfois fragiles, et surtout, les intervenants montrent que rien n’est figé, des évolutions existent, le champ des possibles est là.

    Et, encore une fois, on mesure combien ces Rencontres, ne sont pas une manifestation d’intellectuels pour les intellectuels, mais qu’elles sont inscrites dans la vie, dans le quotidien, à quel point elles le rendent lisible, offrent un recul qui permet de vivre aujourd’hui et demain. Qui permet à chaque citoyen d’être acteur de sa vie, de la vie en société.

    Alors, à l’encontre des simplifications  hâtives productrices d’erreurs tragiques, Franck Frégosi apprécie que l’intitulé de la conférence ajoute un « s » à Islam et Occident. Avant de souligner : « Force est de constater que les Musulmans de France ont trouvé des interactions entre leur religion et la laïcité ». Dans le même sens, Abdenadour Bidar précise : « Il faut dédramatiser la question ». Justifie son point de vue par deux éléments : nous sommes dans des sociétés multiculturelles, dans des sociétés sécularisées ou en voie de sécularisation. Juge donc  « la question qui se pose est de savoir jusqu’à quel point les différences peuvent s’exprimer dans un espace commun afin que celui-ci n’explose pas ? ». Alors que Cengiz Aktar considère, et ce sera le fil rouge de ses interventions : « La réponse à la question de cette table ronde réside dans l’intégration ou non de la Turquie dans l’Europe ».

« Ce n’est pas parce qu’on n’a plus
de foi qu’on est moins intelligent »

    Franck Frégosi travaille sur la pratique religieuse musulmane, il explique : « Nous assistons à une mutation de la pratique religieuse, à un accommodement raisonnable avec la laïcité. Mais il faut bien comprendre que nous sommes dans une période d’adaptation ce qui, parfois, peut produire des tensions ». De même, Abdenadour Bidar souligne : « Pour la majorité des Musulmans d’Europe, la laïcité ne pose aucun problème. Et ils font preuve de beaucoup d’intelligence dans leurs façons de s’adapter ». Mais, l’accommodement, selon lui, « devrait être pensé, verbalisé, accompagné, faire l’objet d’échanges ». D’autant, poursuit-il que  « le fait musulman pose la question de la spiritualité à l’occident et, inversement, l’Europe avec son exigence de laïcité pose à l’Islam la question de son changement, de connaître une cure d’amaigrissement ». Franck Frégosi ajoute : « Il ne faut pas stigmatiser le croyant. Ce n’est pas parce qu’on n’a plus de foi qu’on est moins intelligent ». Il rappelle à ce propos « que le monde musulman n’a pas attendu le siècle des Lumières pour avancer sur les questions de liberté et d’égalité ».  Et Mustapha Chérif de préciser : « Je ne confonds pas le religieux et le politique mais je ne les oppose pas ». Il ajoute : « Certains disaient tout est religieux et ils avaient tort. D’autres disaient tout est politique et ils avaient tort. Aujourd’hui on nous dit tout est marchandise ». Selon lui : « Nous sommes dans un monde où on nous dit soyez comme moi ou je vous hais. Pour ce qui me concerne, je préfère un incroyant ouvert à un croyant fermé. C’est dans le débat et l’échange que nous allons retrouver le sens de la logique et de la justice ». Et il note que « le goulag n’est pas dans Marx, l’inquisition n’est pas dans la Bible, l’ignorance n’est pas dans le Coran ».

« La question du communautarisme
ne se pose pas que chez les Musulmans »

     Cengiz Aktar enchaîne sur la question du communautarisme « qui  ne se pose pas que chez les musulmans, allez voir en Pologne, aller voir le communautarisme républicain qui, au nom de la République, veut nier les différences. ». Puis, il revient à la question turque, affichant sa volonté de déplacer le débat sur un plan politique à propos de la candidature turque à l’Union européenne, précisant que le parti islamique au pouvoir sait œuvrer dans un cadre démocratique. Ce que confirme Franck Frégosi : « La laïcité turque s’est imposée par le haut, copiée sur le modèle français. Et nous assistons actuellement, dans ce pays, à un apprentissage de la laïcité sans  les militaires ».

    C’est de la salle que viendra une question sur la situation des femmes. Les réponses iront toutes dans le sens de celle avancée par Abdenadour Bidar : « Le critère déterminant de l’évolution de l’Islam est celui de l’évolution de la situation des femmes ».

    Enfin, Mustapha Chérif revenait sur la rencontre qui vient d’avoir lieu au Vatican entre Musulmans et Catholiques : « Nous avons décidé de créer une structure permanente de prévention pour la défense de la liberté de croyance et de nous rencontrer tous les deux ans à l’occasion d’un Forum ».

MICHEL CAIRE
Source: La Marseillaise

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